Mardi
matin, un coup de téléphone d'André
Laurenti, le
réputé
vulcanologue cagnois : "je pars pour l'Etna qui est en
éruption, ça
t'intéresse ?". Dix secondes de réflexion et c'est OK, départ pour le surlendemain pour Gênes en Land Rover puis par bateau vers Palerme et enfin vers l'Etna, plus de 30 heures de voyage. |
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Le
vendredi soir, nous
arrivons tard sur Catane, petite ville couverte de cendres noires avec
au loin, le volcan qui crache la lave. Il est fort tard quand nous
plantons la tente avec la promesse d'un grand spectacle si les forces
de
police omniprésentes nous laissent accéder au
site. | ![]() | ||
Samedi
matin, les premiers regards sont pour le volcan, le but de notre voyage. | ![]() | ||
Après
le petit déjeuner, nous partons pour
Nicholosi au centre de police afin d'obtenir des laissez-passer. Sur
place, nous rencontrons des français qui nous racontent tout
excités
comment quelques jours auparavant, ils dormaient à
l'hôtel quand ils
ont
été réveillés par un
tremblement de terre. Le temps d'enfiler quelques
affaires, ils sortaient de l'hôtel pour assister à
l'effondrement de
celui-ci engloutissant tous leurs effets personnels. Une demi-heure
après, une coulée de lave recouvrait la station:
l'Etna venait de
rentrer en éruption. Munis de nos cartes de vulcanologue, nous passons sans encombre le barrage des carabinieri, arrivons à la station de ski, terminus pour tous les véhicules. Le temps d'endosser les affaires de montagne et nous voilà partis pour deux heures et demi d'ascension. | ![]() | ||
Arrivée
vers le haut de la montagne (2800m),
nous pique-niquons tout en saluant les nombreux vulcanologues
français
qui s'y trouvent. C'est même toute la fine fleur de la
vulcanologie
française qui s'est donné rendez-vous, le dernier
endroit où causer ! | ![]() | ||
Pendant
ce temps
là, le général Laurenti surveille ses
troupes | ![]() | ||
Petit
à
petit, la
lumière devient extraordinaire car le soleil est en train de
se coucher
dans l'amas de cendres et de poussière en suspension. Le
froid arrive
aussi et nous nous installons sur le Laghetto, petit cône
situé à 300
m
de l'éruption pour profiter du spectacle son et
lumière annoncé avec le
début de l'obscurité. |
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Alors
dans le froid, nous assistons à un
spectacle extraordinaire où toutes les trente secondes, un
jet de lave
rouge est propulsé à plus de 400 m de haut, soit
deux fois la hauteur
de
la tour Montparnasse avec un grondement sourd suivi quelques secondes
plus tard par un crépitement de blocs de pierres
incandescentes
retombant au sol. |
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Ce
n'est que vers 20 heures que nous
redescendons à la lueur des frontales dans le froid et sous
une fine
pluie de cendres s'incrustant partout ! |
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Après une nuit réparatrice, nous décidons ce dimanche de refaire l'ascension malgré une météo mitigée. Nous nous arrêtons pour faire la prière à la Madone afin qu'elle nous protège. | ![]() | ||
Au
cours de l'ascension, nous nous arrêtons
sur une coulée de lave encore chaude, repartons vers le
sommet mais le
vent ne soufflant plus dans la même direction, nous
décidons de changer
de point d'observation et faisons quelques photos traditionnelles. | ![]() | ||
Là
haut, la brume nous attend mais aussi des
lits chauds. En effet, une profondeur épaisseur de cendres
chaudes se
révèle être le meilleur lit
même si c'est un peu chaud car le
thermomètre indique plus de 55° au sol et
nous sommes obligés
d'enlever les polaires afin de les mettre sous les fesses pour pouvoir
tenir. Puis un groupe d'italiens exubérants (pléonasme?) se place à coté de nous, discute, parle tant et plus de telle sorte que nous devons fuir le vacarme. | ![]() | ||
A
ce moment là, moment magique, la brume se
déchire et nous sommes à 200m de la bouche
explosive, dans une lumière
irréelle de fin de journée, sur nos nouveaux
lits, toujours aussi
douillets mais moins brûlants. |
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On
installe les pieds photos et c'est parti
pour la séance de mitraillage. Soudain, un bruit dans la
nuit comme une
pale d'hélicoptère: un bloc de pierre se dirige
sur nous. Je me
souviens
des conseils: ne pas fuir mais regarder le danger afin de
l'éviter.
Mais, on ne voit rien et il ne reste qu'à attendre. Au bout
de quelques
secondes interminables, un bruit sourd: la pierre s'est abattue
à une
dizaine de mètres de nous. |
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Alors,
dans la nuit, on assiste à un ballet
de lucioles s'agitant sur tout le flanc de la montagne car le groupe de
Jacques-Marie Bardintzeff, le successeur de Tazieff, a lui aussi
entendu
passer des pierres très près et amorce une
retraite anticipée. Au bout de quelques minutes, nous décidâmes aussi de partir et de s'installer plus loin. Nouveaux lits chauds de cendres, on plante les pieds photos dans la cendre et quelques minutes plus tard, odeur de caoutchouc brûlé, le pied photo d'André Laurenti a fondu ! Et c'est fort tard, à la lumière des frontales que, comblés, nous abordons la redescente. | ![]() | ||
Ce
lundi, nous rencontrons des animateurs du
parc Vulcania et décidons de faire journée
commune et d'explorer le
nord
de l'etna alors que jusqu'à présent, nous nous
étions cantonnés au Sud.
Nous partons observer la station dévastée par la
coulée de lave et
comprendre de visu, ce qu'ont vécu les français
rencontrés le premier
jour. En cours de route, la route est bloquée par une
coulée de lave.
En
observant celle ci, nous ressentons quatre petits tremblements de terre. | ![]() | ||
Un spectacle surréaliste nous attend: une coulée de lave qui se caractérise par un champ de pierre de 70 mètres de large recouvre ce qui a été une station de ski. Plus aucune trace de l'hôtel des français, seule une maison tient encore, branlante, et pour combien de temps encore ? C'est totalement impressionnant de se rendre compte qu'en seulement quatre jours de coulée, une station de ski a pu être ainsi rayée de la carte. |
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Mardi,
la météo n'est
vraiment pas fameuse et nous partons observer une des bouches qui a
craché la lave à l'origine des malheurs de la
station de ski. En
faisant
route, nous observons un des effets du tremblement de terre qui a
accompagné l'éruption: la route est nettement
décalée ! Après plusieurs
heures de marche, il faut se rendre à l'évidence,
nous ne pourrons pas
atteindre la bouche du volcan, barrés que nous sommes par
des coulées
de lave quasiment infranchissables. Après discussion avec
des
vulcanologues français, ceux ci nous indiquent un moyen
aisé d'y
parvenir grâce à une piste praticable par le
LandRover. On décide de
remettre cette visite au lendemain et d'aller voir, un village un plus
plus bas touché par le tremblement de terre. Les
dégâts sont peu
visibles car seules quelques maisons et l'église ont
souffert. Par
décence pour les habitants, je ne prends pas de photos mais
dans le
village voisin, on nettoie.... | ![]() | ||
La
route prend parfois de curieuses
directions après un tremblement de terre. |
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De
retour au pied de l'Etna Sud, un violent
orage de grêle mélangée avec de la
neige et nous décidons de nous
réfugier à l'hôtel plutôt que
de bivouaquer comme prévu. | ![]() | ||
Ce
mercredi est le
dernier jour et comme prévu, nous nous rendons sur la
bouche. après une
demi heure de piste avec la Land Rover dans de magnifiques couleurs
d'automne, nous nous retrouvons à moins d'une demi-heure
à pied de la
bouche et c'est en suivant des membres de l'Institut
Géophysique
Italien
que nous nous retrouvons à l'endroit où tout a
commencé. | ![]() | ||
Le
spectacle est hallucinant, une moitié du cône
volcanique a été emporté par la
violence de l'éruption; la faille
éruptive généralement à
peine plus large que de quelques dizaines de
centimètres est ici de plusieurs mètres: du
jamais vu pour les
vulcanologues expérimentés qui m'accompagnent.
Nous prélevons quelques
pierres qui n'ont que quelques journées d'existence et nous
repartons,
satisfaits, dans la brume et la neige qui commence à tomber
doucement. | ![]() | ||
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